le conte de la pluie

Une petite fille ce jour là, arriva dans l’atelier conte, avec le visage fermé et les poings serrés.

Les autres m’expliquèrent que sa toupie lui avait été confisquée. La colère concentrée en elle semblait être un mélange dirigé contre l’adulte qui avait le pouvoir de lui prendre ce jouet et contre elle-même, qui avait joué innocemment, sans se douter du prix à payer.

Quand vint son tour de parole, elle refusa de desserrer les lèvres ou de déposer une émotion dans la boite à secrets, malgré les encouragements bienveillants de tous.

Elle resta ainsi figée, avec un chagrin noué, qu’elle ne pouvait avouer. C’est alors que la créativité du groupe permit cette histoire, à partir de quelques images et de la parole que les enfants prirent, tour à tour…

Il était une fois une planète entièrement recouverte d’eau.

Y vivait le capitaine d’un grand bateau, qui naviguait nuit et jour sur les flots.

Il aimait faire escale dans le port d'une petite île

où vivait une belle jeune fille.

Celle-ci chaque soir donnait un merveilleux spectacle en plein air.

Elle dansait avec des mouvements gracieux sur les plages de sable clair.

Malheureusement à chaque fois que le bateau s'approchait du rivage,

Apparaissaient en même temps de gros nuages,

et aussitôt, la pluie commençait à tomber.

Alors la jeune danseuse courrait s’abriter sous les arbres de la forêt.

Le capitaine repartait le cœur gros,

en maudissant le ciel de lui envoyer encore toute cette eau.

Il s'écria : après chacun de mes voyages,

la pluie chasse tout sur son passage!

Quand pourrais-je enfin accoster

et rejoindre ma bien-aimée?

Énervé, il laissa partir son bateau à la dérive,

implorant le ciel de transformer la pluie en soleil sur les rives...

Puis, comme tout restait gris, il se prit la tête entre les mains,

et se pencha sur la mer qui lui paraissant sans fin.

C’est alors qu’une vague roula, laissant apparaitre au beau milieu,

le visage d’une sirène à la peau bleue.

Celle-ci s’approcha du capitaine et lui parla tout bas :

"je ne sais pourquoi ce mauvais temps arrive quand tu n’en veux pas...

moi j'aime l'eau... et la pluie n'est que de l'eau,

mais si tu souhaites que dehors il fasse beau,

dis-moi si tu sais le temps qu'il fait au dedans de toi?"

Le fier capitaine marmonna que sa colère montait en lui sans qu’il ne sache pourquoi.

"Et bien, dit-elle, peut-être qu’il y a aussi au fond, un peu de tristesse que tu n’oses pas montrer?"

A ces mots, il senti comme coincé dans sa gorge, une grosse boule de chagrin,

et en levant la tête, il laissa ses larmes couler, couler... jusqu’au petit matin.

Quand le jour se leva, la sirène était loin et le soleil brillait de mille feux,

Le capitaine tout heureux,

accosta sur l’île où la jeune fille dansait déjà.

Pas une goute de pluie ne tomba ce jour là,

pas le moindre nuage !

Émerveillé devant le beau temps et le spectacle sur la plage,

le fier capitaine déclara son amour à la danseuse

qui était elle aussi, amoureuse.

Il l’emmena plus tard avec lui pour un long voyage,

se moquant des nuages,

car il avait comprit que le temps du dehors n‘était pas important,

qu'il était le simple reflet du temps du dedans!